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venu ; je sais toutes les chansons qu’on y chante ; je viens chercher ma femme chez la Mère de Dieu ; nous la connaissons depuis deux mois ; elle vient souvent manger chez nous… » Sur quoi Lesueur l’a empoigné : c’est un nommé Ducrest, tabletier, rue Phélippeaux ; il essaie bien de rattraper ses paroles imprudentes ; trop tard ; il est confondu avec les autres et, le soir, – car l’enquête se prolongea toute la journée, – les habitants du quartier de l’Estrapade virent défiler un singulier cortège : la Mère de Dieu, la tête branlante, s’avançait à petits pas, encadrée de gendarmes ; la troupe de ses fidèles suivait entre deux haies de gardes nationaux ; Héron et Sénar dirigeaient la marche, escortés de leur état-major de policiers. Par la rue Saint-Jacques, on gagna l’ancien collège du Plessis qui, réuni aux bâtiments du ci-devant collège Louis-le-Grand, venait d’être transformé en une vaste prison ; les ouvriers y travaillaient encore. C’est là que furent écroués la voyante et ses adeptes : ainsi se trouvait déjà réalisée l’une des prédictions de la mère Catherine, annonçant qu’un grand changement dans son existence s’opérerait en une école voisine du Panthéon.

Sur ce thème, Vadier s’apprêtait à broder. Il n’y avait rien là-dedans qui eût le moindre rapport avec Robespierre ; ceci importait peu. Sans doute il eût été préférable de pouvoir le citer au nombre des dévots de la mère Catherine et de l’avoir surpris à genoux, baisant pieusement les yeux et le menton de la vieille Sibylle ; mais rien n’empêcherait d’insinuer que la Mère de Dieu le considérait comme