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préparatifs, réprimant une forte envie de rire, tout en affectant un air d’admiration recueillie[1].

L’Éclaireuse agita une sonnette ; les rideaux d’une alcôve s’écartèrent et Catherine Théot apparut, grande, sèche, presque diaphane ; sa tête et ses mains, d’une maigreur extrême, étaient agitées d’un tremblement sénile ; elle avança, soutenue sous les bras par deux assistantes ; Sénar reconnut en l’une d’elles la servante qui lui avait ouvert la porte ; l’autre, belle blonde, qui était la Chanteuse, annonça : « Frères, voici votre Mère. » Elles aidèrent Catherine à s’asseoir sur le fauteuil bleu et blanc, s’agenouillèrent devant elle, baisèrent sa pantoufle et se relevèrent, disant : « Gloire à la Mère de Dieu ! » On apporta une aiguière : la prophétesse se lava les mains, les essuya avec un linge très blanc[2] que l’Éclaireuse lui passa ensuite sur le front, sur les yeux et sur les oreilles. Cette sommaire toilette terminée, on servit sur un plateau une tasse remplie de café au lait et des tartines[3] ; tandis que la Mère déjeunait, de nombreux adeptes se groupaient autour d’elle : hommes et femmes de toutes conditions, entraient, s’inclinaient et prenaient place « sur des sièges semblables à des chaises longues[4] ». Héron et Sénar assistaient dévotement

  1. Mémoires de Sénar, 171.
  2. Le très beau linge abondait chez Catherine Théot. Archives nationales, F7 477527. Lettre du bureau du domaine national au Comité de sûreté.
  3. L’inventaire signale une cuiller et sa fourchette d’argent, à filets, sans marque, un gobelet d’argent et son couvercle, estimés 5.000 livres.
  4. On ne voit rien de tel dans l’inventaire du mobilier. En fait de sièges, n’y sont mentionnés que la bergère, les deux fauteuils, six chaises et un tabouret de paille.