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part pour Rome, afin de « convertir le pape[1] ». En ce printemps de l’an II, se promène tranquillement dans Paris, indifférent à ce qui se passe, et sous la sauvegarde d’un protecteur anonyme, Saint-Martin, le philosophe inconnu ; bien que le sens de ses écrits soit impénétrable aux profanes, bien qu’il y assure « avoir changé sept fois de peau en nourrice[2] » et qu’il croie fermement que « la sagesse divine se sert d’agents pour faire entendre son Verbe dans notre intérieur », ses livres sont parsemés de « points si lumineux, de remarques si profondes, produisant l’effet de perles sur un fond sombre et obscur[3] », qu’ils lui ont attiré un grand nombre d’enthousiastes disciples. Admirateur de Rousseau, il est pénétré de l’Émile et du Contrat social ; il a pour lui toutes les femmes auxquelles il reconnaît une disposition particulière aux communications avec les esprits de la région astrale[4]. Il vit à Petit-Bourg, chez la duchesse de Bourbon dont il est l’oracle, et qui recueille toutes les somnambules et tous les sorciers en disponibilité, tous les chercheurs de pierre philosophale en quête de subsides. C’est chez la mystique Altesse que Saint-Martin formule pour la première fois son « ternaire sacré » : – Liberté, Égalité, Fraternité, qui deviendra le programme de la Révolution et dont se pâment toutes les belles oisives, princesses,

  1. Une mystique révolutionnaire, Suzette Labrousse, par l’abbé Christian Moreau, 1886.
  2. Mon portrait historique et philosophique, par Saint-Martin. V. Matter, Saint-Martin, le philosophe inconnu. Deuxième édition, 2.
  3. Matter, 90.
  4. Idem, 180.