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perpétuel[1] ». De toutes parts, a-t-on dit, la foule qu’écrasait le poids du néant officiellement décrété, « levait les yeux dans sa détresse, s’efforçant d’apercevoir un coin du ciel ».

Depuis plusieurs années une réaction se produisait contre la sécheresse des théories philosophiques. On a renoncé aux vieilles croyances, mais le vide fait horreur et l’on cherche à les remplacer. C’est ainsi que la doctrine des quakers a groupé, après la guerre d’Amérique, un assez grand nombre d’adeptes. Brissot est revenu quaker de son voyage aux États-Unis, et l’on a vu, au début de 1791, une délégation de la secte se présenter à l’Assemblée nationale, afin de solliciter l’autorisation pour les quakers français de pratiquer leur religion telle qu’ils l’entendront, de garder en toute occasion leur chapeau sur la tête, et d’être dispensés de faire la guerre[2]. D’autres se tournent vers le magnétisme : Bergasse, esprit distingué et pénétrant, s’est accointé d’une servante « qui devine à la fois le mal et le remède » ; beaucoup croient aux prédictions : dom Gerle, ancien Père chartreux, prédicateur renommé, ex-prieur de l’abbaye du Val-Dieu et de l’abbaye de Port-Sainte-Marie, député du clergé aux États généraux, devient le dévot soumis d’une prophétesse, Suzette Labrousse, dont il a louangé les étonnants mérites à la tribune de l’Assemblée constituante[3] et qui, habillée en mendiante,

  1. Journal de Paris, 3 frimaire an II, p. 1315.
  2. Bernard Fay, L’Esprit révolutionnaire en France et aux États-Unis à la fin du XVIIIe siècle, p. 198, et Moniteur, réimpression, VII, 355 et s. Séance de l’Assemblée constituante du 10 février 1791 au soir.
  3. Moniteur, réimpression, IV, 621.