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BOISHARDY

nier de la bande n’est pas moins fêté : on le voit distribuant des bénédictions, faisant baiser aux fidèles une petite croix de bois. Ce que l’on regarde aussi ce sont les chouans, — ces chouans de Boishardy dont on parlait tant sans les voir jamais : quelques-uns portent « l’uniforme national » ; déserteurs des Bleus, probablement ; d’autres ont l’ancienne tenue de l’infanterie royale, habit blanc à parements et à revers noirs ; la plupart sont en vestes de paysans. À tous les chapeaux la cocarde blanche. Ils sont armés de fusils simples ou à deux coups. Ils vont et viennent en grande animation, entrant dans les maisons, se faisant servir à manger, réquisitionnant les armes ; plusieurs, sans vergogne, se groupent autour de la fontaine et, comme le temps est beau, se déshabillent et se lavent. Un seul incident : vers midi, rassemblement. Boishardy avise un de ses hommes qu’attarde un lourd fardeau. Qu’y a-t-il là-dedans ? Sous ses yeux on ouvre le paquet : cinq couvertures de laine, une canne à pomme d’or, une épée à garde brillante. L’homme est fouillé ; dans sa poche une montre en or. C’est un pillard. Ordre de le fusiller sur-le-champ. On intercède ; on obtient sa grâce. Les objets volés sont renvoyés à leur propriétaire avec les excuses du « général » : — « Boishardy ne veut pas commander à des brigands. » À midi et demi toute la bande s’éloigne par la route de Dinan. On apprit le soir qu’elle avait fusillé, en passant à Lescouët « un ouvrier occupé à démolir l’église ; puis qu’elle traversa Plestan vers le petit jour, se dirigeant vers Bréhand[1]… Boishardy s’était

  1. Lettre des administrateurs du district de Lamballe aux administrateurs du district de Port-Brieuc. — Lettre de l’ingénieur des