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LA MIRLITANTOUILLE

chapeaux et en peaux de bique, campés dans les Champs-Élysées. La Convention décide « la paix à tout prix », et, de Rennes, Boursault, prenant les devants, proclame, dès le 17 octobre, « sa loi de pardon et d’humanité ». Il accorde grâce à tous, même aux déserteurs, s’ils se rendent dans le délai d’un mois. Nul effet ; à peine soixante ou quatre-vingts rebelles de la Mayenne consentent-ils à déposer les armes. La Bretagne reste sourde. Que veut-elle donc ? Ses prêtres ? Eh bien, puisqu’il le faut, on les lui rendra. Et, de nouveau Boursault, à grands cris, réclame du Comité de Salut public une nouvelle reculade : — « Liberté des cultes ! Liberté des cultes ! » ou bien tout est perdu, ajoutant, en penseur libéré qui s’est absorbé dans la méditation de ces graves sujets : — « Il faut des siècles pour créer ou détruire les erreurs et les préjugés religieux. » Il parcourt les campagnes, semant sa proclamation, la commentant par des harangues : à Moncontour, à Dinan, à Lamballe, à Ernée et ailleurs, dans les églises, du haut de la chaire, il pérore, s’attendrissant sur les « trop crédules habitants des campagnes », séduits ou contraints par de misérables exploiteurs de leur naïveté. À tous ces humbles, à tous ces égarés, la République octroie le plus généreux pardon. Malgré qu’il parsème ses discours de tirades empruntées aux tragédies de son ancien répertoire, son éloquence est en pure perte. Comment n’aperçoit-il pas que tout en lui froisse et révolte ces « paysans crédules » qu’il imagine débrutir ? Dans cette église que la Révolution leur a volée, d’où elle a chassé leur curé, leur bon Dieu, leur Sainte Vierge pour y installer deux intrus,