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BOISHARDY

vice à l’époque des guerres d’Amérique, épousé une veuve très riche, fait partie, en 1791, de l’état-major de Bouillé, puis de la garde constitutionnelle du Roi. Émigré à Coblence, de là en Angleterre, il s’est lassé de la vie oisive et il passe en France dans le vague espoir d’y trouver un emploi. Puisaye écoute ce récit, prend à part le nouveau venu qui n’offre, comme référence, qu’un certificat « flatteur » du marquis de Bouillé et une recommandation du « Conseil des Princes ». Cela paraît très suffisant ; d’ailleurs le temps manque ; Dufour, renonçant à déjouer la surveillance du Clos Poulet, se décide à chercher du côté de Saint-Briac une plage moins hérissée d’obstacles. Ainsi pris de court, Puisaye n’hésite pas : il confie à Cormatin, stupéfait, le gouvernement de toute la Bretagne et des provinces avoisinantes, le nomme, sans désemparer, major général de l’armée catholique et royale, et le présente comme tel à ses compagnons d’armes. Suprême hâblerie, car, bien certainement n’osa-t-il pas tout de même avouer qu’au hasard seul était due l’éminente promotion de cet inconnu ; c’eût été, dès l’abord, ruiner le crédit de son intérimaire improvisé ; sans doute déclara-t-il que, s’il s’attardait depuis une quinzaine de jours, c’était dans l’attente de ce suppléant, choisi entre mille par la sagesse des Princes et qu’il se portait garant de ses hautes qualités administratives et stratégiques[1]. Là-

  1. Puisaye n’hésite pas à avouer que Cormatin auquel il confiait une si lourde tâche, lui était tout à fait inconnu : — « Quand Cormatin arriva en Bretagne, cet officier m’était absolument étranger… Pendant mon séjour en Angleterre, le comte de Contades, frère du gendre du marquis de Bouillé, fut chargé par ce général de me donner sur le compte de M. de Cormatin quelques notions