Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/51

Cette page a été validée par deux contributeurs.
41
BOISHARDY

de la mer étant gardés par une ceinture de tentes dressées à cinquante pas l’une de l’autre et occupées chacune par quinze hommes sous le commandement d’un officier[1] ».

Puisaye, résolu à prendre la mer sur la côte du Clos Poulet[2], avisa de cette décision celui de ses agents qui dirigeait dans cette région le service de la correspondance : c’était Mathurin Dufour, marin intrépide, de la paroisse de Saint-Coulomb. Il ne cacha point qu’on risquait gros ; la manœuvre imposée était celle-ci : « Attendre une nuit très sombre, passer la ligne des tentes à plat ventre, le fusil armé et « en banderole » ; ne répondre jamais à un qui-vive que par un coup de fusil » ; moyennant ces précautions, on pouvait atteindre la grève et si l’on avait la chance de trouver une barque échouée sur le sable on était sauvé. Pour épargner ces difficultés à « M. le commandant en chef des armées royales de Bretagne et pays adjacents », Dufour s’occupa de repérer l’endroit le moins exposé de tout son canton. Cette exploration se prolongea, non sans alertes, durant une quinzaine de jours. Puisaye, réfugié à l’intérieur des terres avec quelques-uns de ses officiers[3], eut tout le loisir de réfléchir à sa situation : il songea que sa disparition risquait de susciter parmi ses lieutenants des rivalités ; l’un d’eux n’en profiterait-il point pour usurper le comman-

  1. V. Un chef de la correspondance des Princes français pendant la Révolution. Mémoires du colonel Dufour, de Saint-Coulomb, publiés par P. Delarue, Saint-Servan, 1906.
  2. On nommait et on nomme encore ainsi la contrée qui s’étend, le long de la mer, depuis les bords de la Rance jusqu’à Cancale.
  3. Il écrit, Mémoires, II, 588, qu’ « il avait à ce moment auprès de lui la plupart des principaux chefs convoqués pour connaître avec lui la conduite à tenir pendant son absence. »