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LA MIRLITANTOUILLE

été jugées si la sœur du Premier Consul n’y avait été mêlée[1] ». C’est peut-être ça la vérité : Pauline avait besoin d’argent, et son trop docile amant lui en procura. Mais l’accusation de lâcheté reste inadmissible, sinon comme l’atroce et perfide vengeance d’un mari trompé.

Si l’amour causa la perte d’Humbert, il fut plus favorable à Cormatin qui lui dut la consolation de ses malheurs. On a laissé l’étonnant pacificateur de 1795 enfoui, avec ses six aides de camp, au fond d’un cachot sans air et sans jour du fort de l’île Pelée, dans la rade de Cherbourg. En juillet, on le tira de là, et on l’amena, ainsi que ses officiers, à Paris, pour y être jugé. Incarcéré à la Conciergerie, traduit devant le Conseil de guerre, il usa adroitement de sa faconde et sauva sa tête au grand dépit du gouvernement. Condamné à la déportation[2], et reconduit à l’île Pelée, il y devait attendre son départ pour la Guyane. Mais Merlin de Douai, l’impitoyable juriste, veut la mort du ci-devant major général comte de Puisaye : il le fait rejuger par le tribunal criminel de la Manche devant lequel Cormatin comparaît sous l’accusation de correspondance avec les ennemis de la république. On a, en effet, saisi sur lui des lettres qu’on dit très compromettantes et l’on s’attend à la révélation de nouveaux secrets pleins d’horreur. Or, ce ne sont que billets d’amour : l’un est adressé à madame de Tal… ; Cormatin proteste qu’il l’aimera toujours, bien qu’elle se soit jouée de

  1. Chassin, Pacifications, III, p. 200, n.
  2. Sauf Dufour, condamné à six mois de prison, les aides de camp de Cormatin furent acquittés.