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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

dotte ; mais il est très remarquable de constater que, dès cette époque, il songe à quitter l’armée ; il s’établit dans le Morbihan où il achète, aux environs de Ploërmel, un bien d’émigré, le domaine de Crevy. De malveillantes rumeurs se répandent ; on parle de cet officier général « taré dans l’opinion publique[1] » ; on le dit obéré dans ses finances, harcelé par ses créanciers, mal vu du gouvernement. Il est attaché, en 1802, à l’expédition de Saint-Domingue que commande Leclerc, beau-frère de Bonaparte : l’ardente Pauline est du voyage. Humbert, on l’a dit, passait pour « le plus bel homme de l’armée[2] », et la sœur du Premier Consul se montrait facilement sensible à ce genre d’avantages. Que se passa-t-il ? On ne sait. Humbert, chassé de Saint-Domingue par le général en chef Leclerc, destitué par le Premier Consul, fut exilé en surveillance à Épinal, avec défense de reparaître à Paris. Il implore de connaître les motifs de sa disgrâce, n’obtient pas de réponse[3], va s’enterrer, non dans les Vosges, mais dans son domaine du Morbihan, grevé d’hypothèques, car « on a profité de sa défaveur pour lui soustraire sa fortune ». Il essaie de son premier état, fonde un haras, dilapide ainsi le peu qui lui reste, vient se

  1. É. Sageret, Le Morbihan sous le Consulat, IIA, p. 302.
  2. « M. Humbert est de la plus belle apparence ; il s’exprime avec facilité : il appartient à une famille honorable du département des Vosges. » Lettre du préfet de la Loire-Inférieure au ministre. (Archives nationales, F7 6355.)
  3. « L’empereur a pensé qu’il ne pouvait en aucune manière prononcer sur cette demande qui regarde le ministre de la Guerre. » En fructidor an XII, le ministre de la Police demande au ministre de la Guerre les causes de la disgrâce d’Humbert : il lui est répondu simplement que « l’intention de l’Empereur est que ce général soit éloigné de Paris où ses intrigues peuvent rendre sa présence dangereuse ». Archives nationales, F7 6355.