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LA MIRLITANTOUILLE

ordonne l’évacuation immédiate des femmes et des blessés et la mise en batterie du canon. Grand désordre ; les occupants du château se bousculent pour en sortir ; les Chouans se pressent pour y pénétrer et se poster aux fenêtres d’où ils domineront les assaillants et les fusilleront plus à l’aise. Les chevaux, dans le tumulte, prennent peur, renâclent, s’échappent ; et déjà voici les Bleus : à l’abri des fourrés qui, de toutes parts, encadrent le château, ils avancent en tirailleurs ; le canon des Chouans, mal chargé et mal ajusté, crache sa mitraille à quelques pas[1] ; aux fenêtres, les gas embusqués font feu ; la fusillade crépite ; les femmes qui n’ont pu fuir encore s’affolent ; l’une d’elles tombe, frappée à mort[2] ; sous le portique à colonnes du château, Étienne et Honorat Le Frotter sont aux côtés de leur mère ; l’un d’eux s’est emparé d’un cheval ; ils la mettent en selle ; elle vacille, s’affaisse, retombe, la poitrine percée de deux balles. Ses fils la soutiennent, la déposent sur les marches du perron ; et, tandis que, penché vers elle, Étienne guette ses derniers souffles, lui-même, atteint au front, s’abat sur les degrés de pierre, près du cadavre de celle qu’il a sauvée de l’échafaud[3].

  1. Habasque, II, p. 81.
  2. Une femme Penvon, — ou Pevron — délivrée de la prison de Saint-Brieuc. Déclaration de Marie-Yvonne Rideau. Celle-ci « a été également témoin de la mort de madame Le Frotter », mais elle ne donne aucun détail.
  3. C’est la version qui m’a été transmise par M. Berthelot du Chesnay, ancien officier de marine, en 1912. Habasque écrit (II, 80, note) : — « Cette dame (madame Le Frotter) était sur un cheval ; elle tomba à la première décharge ; son fils périt dans la même rencontre. » — Le Maout, Annales armoricaines, 1846, écrit : — « Madame Le Frotter et une autre femme, qui étaient à cheval, tombèrent dans cette décharge. Cette dame fut ensuite fusillée,