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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

soi des délateurs éventuels, on emmènera tout ce que la prison contenait, ainsi que les six gardes nationaux du poste qui se sont rendus sans défense[1] ; quand on sera en lieu sûr, on fera le tri ; il y a parmi eux des coupables à punir : Peyrode et Giraudeau seront passés par les armes… Mais où sont-ils ? On s’informe, on les réclame ; ils ont disparu. — « Il nous les faut morts ou vifs ! » crie Justice, et, suivi de quelques Chouans, il rentre dans la prison ; il reparaît bientôt, ramenant Giraudeau, découvert tapi au fond d’un cachot obscur ; quant à Peyrode il est introuvable. On sut depuis que, caché sous des bottes de paille au moment de l’invasion de la maison d’arrêt, il avait profité du désordre et de l’obscurité pour se jeter hors de la prison, dévaler la pente abrupte du ravin où coule le Gouëdic, et s’enfuir dans la direction du Moulin Neuf[2]. À défaut de sa personne, on prit sa bourse, — 1.400 francs — et on lacéra ses livres d’écrou[3].

Il était sept heures du matin ; les chefs royalistes se préparaient à évacuer la ville ; Justice tempêtait ; quelqu’un l’entendit maugréer « qu’on était arrivé deux heures trop tard et qu’on n’aurait pas le temps d’exécuter tous les projets[4] ». À cet instant, une vive fusillade éclata du côté de la cathédrale ; plusieurs gendarmes et ouvriers militaires, ayant réussi à se glisser, sans être vus, dans une maison en construction, place de la Liberté, s’y étaient

  1. « Voyant l’impossibilité de résister, les soldats ne jugèrent pas à propos de tirer. » Habasque, II, p. 76.
  2. Dit aussi le Petit-Moulin. Déclaration de Peyrode.
  3. Déclaration du concierge Peyrode.
  4. Habasque, II, p. 71.