Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/190

Cette page a été validée par deux contributeurs.
173
DUVIQUET

rien de louche, rien de mystérieux. Il est rare cependant qu’un émigré nomade, un chouan de marque, ne soit pas réfugié là dans quelque cache, attendant la nuit pour se remettre en route ; c’est un point de transit de la correspondance royaliste entre les régions de Rennes, de Vannes, d’Uzel, de Merdrignac : les courriers y déposent leurs dépêches : qui s’étonnerait de voir entrer en cette guinguette isolée, pour souffler et casser la croûte, un bûcheron, un sabotier, un mendiant, fatigués de la traversée de la lande ? Ils sont sûrs d’y trouver, outre de bons avis sur les mouvements des troupes, des armes, des munitions, des déguisements au besoin. On croirait même que, pour ne pas attirer sur ce précieux abri les curiosités indiscrètes, les chefs de la Chouannerie en détournent leurs bandes : c’est, comme on l’a vu, à Bel-Air, ou plus loin encore, à la Butte à l’Anguille, que se forment les rassemblements. De la Mirlitantouille, nul ne s’occupe, nul ne parle ; Mairesse qui connaît bien l’endroit, puisqu’il y passe chaque fois qu’il se rend de Bosseny à Kerigant par les landes du Mené et la forêt de Lorges, Mairesse ne le cite qu’une fois dans sa prolixe relation : encore est-ce bien probablement un hasard qui l’y amena. — L’un des hommes de Duviquet, nommé Giraud, étant allé à Saint-Brieuc, « lâcha, dans un café, quelques mots contre Le Gris-Duval, Dutertre et autres ». La chose fut répétée à Dutertre qui en informa Le Gris. À quelques jours de là, Mairesse entrant au Mautray, chez Bigot, voit, « installé à boire avec des paysans », Le Gris qui l’attire au dehors et, « parlant tout bas » lui commande d’aller, avec La Douceur et Thurier, — deux gars sûrs, — à