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LA MIRLITANTOUILLE

reuse et la société très agréable : les deux beaux-frères, Le Gris-Duval et Kerigant avaient de l’esprit et de la bonne humeur ; leurs jeunes femmes, également belles, étaient accueillantes et distinguées ; en outre, vivaient sous leur toit leur sœur, non mariée[1], les dames de Guernissac, la jolie Joséphine de Kercadio qui, jugeant peu sûr ou trop sévère le séjour à son manoir de Bréhand, s’était fixée à Bosseny où la présence de Pont-Bellenger et des officiers nobles de son ex-état-major mettait une animation distrayante[2].

Quelque adversaire jaloux voulait-il la mort de Pont-Bellenger ? Une dénonciation mystérieuse éveilla-t-elle les soupçons des administrateurs du district de Broons ? Ils avertirent leurs collègues de Loudéac qu’il se passait « du louche » chez Le Gris-Duval : une nuit — c’était celle du 3 août 1795, — Le Gris-Duval, Kerigant et sa femme étant absents, un détachement du 2e bataillon de l’Ain, parti de Loudéac où il cantonnait, parvint à se glisser, sans donner l’éveil, dans les mauvais chemins de la Ville-Hermel. Au cri Qui vive ? poussé par les Chouans postés en sentinelles aux abords de Bosseny, les Bleus répondent : — « Bons royalistes et catholiques[3] ! Ils passent ; la maison est cernée ;

  1. Elle épousa plus tard M. Le Coniac de La Pommerais.
  2. Il semble bien que nul contemporain n’eut soupçon du séjour de Pont-Bellenger à Bosseny ; on n’en a eu indirectement la révélation que par un document découvert beaucoup plus tard dans les Archives des Côtes-du-Nord, un brevet délivré au comte Salomon de Lorgeril, brevet signé Vicomte de Pont-Bellenger, commandant en chef l’armée royale et chrétienne, et daté de Bosceny près de Moncontour, le 27 juillet 1795. V. P. Hémon, Le Comte du Trévou, p. 73-74.
  3. Les administrateurs du district de Loudéac à ceux du district de Broons, 18 thermidor, III. Archives des Côtes-du-Nord.