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LA MIRLITANTOUILLE

ner les Morbihannais sains et saufs dans leur pays. On part la nuit ; Georges mène la colonne ; en passant sur la chaussée d’un étang[1], les Chouans se dépouillent de leurs vestes rouges et les jettent à l’eau ; au soleil levant, on est à Corlay ; à Mur, les hommes de Saint-Régent se détachent du gros de la troupe pour regagner leurs foyers ; à Locminé, ceux de Guillemot bifurquent vers le pays de Bignan. Dans les derniers jours de juillet, l’Armée rouge arrivait à Moustoirac, ayant parcouru vingt-cinq lieues sans perdre un homme et dépisté les troupes mises à sa poursuite. Sa pitoyable randonnée coûtait à la chouannerie Tinténiac ; mais elle donnait l’essor à Georges, l’indomptable chef qui va la personnifier jusqu’à la fin. Il cantonna sa troupe à Kervanic[2] et à Kerniven[3], à proximité des landes de Lanvaux et de la forêt de Camors, au point stratégique où, quinze jours auparavant, sa présence eût sauvé la cause royale. Arrivée trop tard au rendez-vous, elle se dispersa : le désastre des émigrés était consommé et déjà s’en propageaient les épouvantables et grandioses épisodes : — l’attaque désespérée du 16 sous la conduite de Sombreuil[4], ce chef de vingt-six ans auquel le cabinet britannique confiait le commandement général des troupes expéditionnaires ; — l’héroïsme acharné des gentilshommes soldats, arrachant des cris d’admiration aux grenadiers de Crublier et d’Humbert : — « Comme

  1. Probablement l’Étang neuf, entre Plésidy et Saint-Gilles-Pligeaux.
  2. En Plumelin.
  3. En Moustoirac.
  4. Il était le frère de l’héroïne des massacres de l’Abbaye en septembre 1792.