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DUVIQUET

gées à chaque instant du jour par cette mystérieuse spontanéité de communications qu’improvisent les grands événements. On pleurait de joie au poignant récit du débarquement : — les émigrés se jetant à genoux pour baiser la terre natale ; — Tinténiac, faute de drapeau, déployant au bout d’une perche sa chemise, et l’arborant sur les dunes ; — l’enthousiasme des pêcheurs et des maraîchers de la presqu’île, se précipitant dans l’eau par centaines et s’attelant aux bateaux pour amener plus vite sur la plage « les libérateurs » ; — l’affluence incessante des paysans venus de Plouharmel, d’Auray, d’Erdeven, voire de Ploumergat ou de Locminé, femmes, vieillards, enfants, arrivant processionnellement, croix et bannières en tête, comme en pèlerinage à un lieu miraculeux ; — l’immense clameur : Vive la religion ! Vive le Roi ! quand apparut, descendant des navires anglais, Mgr de Hercé, évêque de Dol, avec sa mitre et sa crosse, entouré de quarante prêtres revêtus de leurs ornements sacerdotaux ; — l’afflux continuel des Chouans surgis des forêts et des landes, émerveillés, ébahis à la vue du général comte de Puisaye passant en revue son armée, à la tête de son état-major composé de plus de soixante officiers. Ils sont tous accourus les fameux de la Chouannerie morbihannaise, Cadoudal, Guillemot, Saint-Régent, Mercier, Rohu, et les nobles émigrés considèrent avec une surprise un peu distante ces chefs populaires aux frustes allures. Et puis, ce fut, le dimanche 28 juin, la grand’messe célébrée sur la plage, devant toute l’armée formée en carré ; la distribution des drapeaux blancs fleurdelysés que Mgr de Hercé avait bénits « au milieu