Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/143

Cette page a été validée par deux contributeurs.
126
LA MIRLITANTOUILLE

Le lendemain de la mort de Boishardy se répandit le bruit du décès de l’orphelin du Temple, le petit roi Louis XVII pour lequel on combattait depuis tant de mois. On ne s’en émut guère car, à vrai dire, on n’y crut pas[1]. Mais, huit jours plus tard, le 26 juin, alors que la pauvre Joséphine de Kercadio était encore sous le coup de l’effrayant cauchemar, tout l’Ouest, — de la Rochelle à Caen et du Mans à Brest — tressaillit au retentissement d’un formidable coup de tonnerre : partout, — dans les villes comme dans les métairies les plus isolées, — on sut à la fois qu’une puissante flotte anglaise, portant une armée d’émigrés, — la flotte depuis si longtemps promise et armée par Puisaye, — avait, la veille, jeté l’ancre, dans la baie de Quiberon : ce fut pour les uns une stupeur affolée ; pour d’autres une joie suffocante. De l’avis de tous la Révolution était terminée : dans quelques heures Nantes, Rennes, les ports, seraient au pouvoir des royalistes, la République n’ayant pas de troupes en nombre suffisant pour s’opposer à leur invasion provoquant un soulèvement général[2]. La Bretagne vivait des heures enivrantes, insatiable des nouvelles propa-

  1. C’est une question de savoir si Boishardy apprit, avant de mourir, l’événement du Temple. Il fallait au moins cinq ou six jours, à un courrier spécial, pour porter de Paris un message à Moncontour. La mort de l’enfant détenu est du 8 juin ; mais elle ne s’ébruita à Paris que le 10. Boishardy a pu en être informé le 15. Il est à noter que le premier qui nia la mort de Louis XVII au Temple fut l’un des officiers de Boishardy, Chantreau. (Béjarry, Souvenirs vendéens, 158-159.) Il avait vécu à Bréhand, assisté aux entrevues d’Humbert, et devait être très renseigné de choses qui n’ont pas été dites.
  2. Danican, Les brigands démasqués, p. 191, écrit : — « Tout semblait se réunir pour assurer des succès aux Royalistes, et si, à cette époque, ils eussent remporté un succès éclatant, ils entraînaient toute la France dans leur parti. »