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BOISHARDY

don ». Depuis que sévissait la persécution religieuse, les fervents catholiques de la région venaient là, secrètement, la nuit, faire rectifier par quelque prêtre insermenté, les baptêmes et les mariages célébrés à contre-cœur devant les ecclésiastiques constitutionnels[1]. Boishardy décida que son mariage serait béni à la chapelle de Saint-Malo ; sa fiancée y viendrait, sans danger, de la Ville-Louët sous la conduite de deux dévoués compagnons, le jeune Hervé Du Lorin, âgé de dix-sept ans[2], et le fermier Jacques Villemain[3], qui serviraient de témoins et signeraient, avec les époux, au registre de catholicité où les « bons prêtres » consignaient les actes de cette sorte pour faire foi lors des régularisations futures. Il suffisait de trouver le « bon prêtre », et ce fut facile : la Bretagne ne manquait pas, même aux pires époques de la Terreur, d’ecclésiastiques réfractaires exerçant clandestinement leur ministère et toujours empressés à l’appel des fidèles qui réclamaient leur secours.

La sommaire cérémonie fut fixée à la nuit du 16 au 17 juin. Le 12, deux chouans déserteurs se présentent au commandant Coulombeau, déclarant leur intention de profiter de l’amnistie. Coulombeau, le lendemain, apprit d’eux que Boishardy viendrait, ce jour-là, vers midi, à La Ville-Louët. Le général Crublier, prévenu sur-le-champ, donne ordre à tous ses cavaliers de monter à cheval ; chacun d’eux

  1. A. Houssaye, Moncontour de Bretagne et ses environs, p. 20.
  2. Louis-Joseph Hervé du Lorin, né à Ploeuc, le 14 avril 1778, de maître Louis-Joseph-Marie Hervé, sieur Du Lorin et de Dame Charlotte Pinault, son épouse.
  3. Jacques Villemain est souvent désigné sous la qualité d’aubergiste. Il avait, en 1795, 60 ans.