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BOISHARDY

publicains a émoussé son ardeur à la lutte. Il s’est, à La Prévalaye, montré l’un des plus ardents pacifistes, professant la même répugnance que son ancien chef, La Rouerie, pour l’intervention armée de l’Angleterre. Or, à ce début de juin 1795, de tous les chefs des Côtes-du-Nord, il est seul à savoir que, en ces jours mêmes, une escadre anglaise, sous le commandement effectif de Puisaye, fait voile vers la France[1], apportant aux royalistes bretons des renforts, des munitions et de l’argent. Que fera Boishardy ? Il a juré de ne jamais reprendre les armes contre la République : manquera-t-il à son serment ? Ou se résignera-t-il à ne point prendre sa part de l’immanquable victoire de la cause royale ? D’Andigné qui le vit dans les premiers jours de juin fut frappé de son indécision : — « Elle me laissait, écrit-il, des inquiétudes d’autant mieux fondées qu’elle tenait à une confiance mal placée dans la parole des républicains. Hoche, en effet, lui avait témoigné de l’intérêt et n’avait rien négligé pour se l’attirer[2]. »

Depuis le 14 mai, l’adjudant général Crublier commandait le camp de la lande du Gras, entre Lamballe et Moncontour. Incorrigible coureur de jupons, en dépit de ses 56 ans, c’était un soldat énergique et dur ; Hoche avait en sa fermeté grande confiance[3].

  1. « Quatre personnes seulement en Bretagne avaient le secret de l’expédition que préparait l’Angleterre, MM. de Silz, de Boishardy, de La Vieuxville et moi. » D’Andigné, Mémoires, I, 219.
  2. D’Andigné, Mémoires, I, 221.
  3. « 14 mai 1795. Vous voilà enfin commandant d’un camp, mon cher Crublier, je ne doute pas que vous alliez oublier et Mariette et Manon pour ne vous occuper que des hommes à la tête desquels vous vous trouvez placé. N… a été dénoncé par de vils coquins comme un efféminé qui faisait gémir le duvet dans la ville de Lam-