page jusqu’à Rennes : la paix est conclue : Vive l’Union, Vive la France ! Les fanfares éclatent, les salves tonnent… Hoche, sceptique en présence de cette joie populaire, montre à ses généraux Chèrin et Krieg, deux bandes de corbeaux qui tournoient au-dessus de La Mabilais ; elles se séparent ; l’une reste unie, l’autre se disperse, et il voit là un présage à la manière des anciens[1]. Là-bas, à La Prévalaye, un homme effondré sur un canapé sanglote ; c’est le comte de Silz ; il vient de signer[2] ; au compagnon d’armes qui s’efforce à le réconforter, il dit, « fondant en larmes » : — « J’ai perdu votre amitié… vous ne m’estimerez plus… Et les princes ? Quelle idée auront-ils de moi ?… »
Cormatin, lui, exulte : comme Charette à Nantes, il va faire à Rennes son entrée triomphale : les représentants ont invité à souper les signataires du traité ; le cortège se forme : les tambours, la musique, les vingt « pacifiés » signalés par leurs panaches blancs, puis les voitures des représentants, Hoche, ses cavaliers et son état-major ; enfin la foule tumultueuse, et tout cela défile entre deux haies de gardes nationaux. Cormatin guette les acclamations ; pour qu’on le distingue bien, il a entouré son chapeau d’une couronne de lauriers. On arrive rue de la République, à l’ancienne Intendance, qu’occupent les représentants. Le repas préparé avec pompe est l’occasion de terribles bousculades : la plupart des convives, à jeun depuis le