Page:Lenotre - Georges Cadoudal, 1929.djvu/40

Cette page a été validée par deux contributeurs.

blanc de son feutre au plus fort de la mêlée. Certains pourtant assuraient l’avoir rencontré, sans escorte, dans la campagne, marchant à grands pas, « armé d’un fusil à vent qui foudroyait les bleus sans bruit, et toujours suivi par un grand lévrier sale et très laid, portant sous son collier la correspondance du parti ». Mais tant de fables ont germé sur cette ténébreuse histoire qu’on doit se méfier des imaginations paysannes. Dans l’âme du plus rude bas-breton se perpétue un besoin de poétiser qu’entretiennent la solennelle solitude des landes, le gémissement perpétuel de l’Océan, l’énigme de ces mystérieux menhirs dont abonde le Morbihan ; le souvenir qu’a laissé Georges Cadoudal s’est orné de tous ces prestiges. Au vrai, s’il se montrait rarement, il ne restait pas oisif. Des réduits où il se retire, il donne des ordres, devient « une puissance » et gouverne le Morbihan « autant et plus peut-être que les agents de l’administration républicaine du chef-lieu ». Soit pour assurer son incognito, soit pour mieux dépister les espions, ses affidés l’ont surnommé Gédéon, sobriquet biblique, l’assimilant au terrible juge d’Israël qui, à la tête de trois cents braves déterminés, affranchit ses compatriotes de l’oppression des Madianites.