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de Réal venu, au nom de l’Empereur, pour l’inviter à demander sa grâce ? Il paraît certain que Napoléon regrettait la mort de ce Breton intrépide ! « Celui-là est bien trempé, disait-il à Bourrienne ; entre mes mains un pareil homme aurait fait de grandes choses. Je lui ai fait dire par Réal que s’il voulait s’attacher à moi… je lui aurais donné un régiment. Il a tout refusé : c’est une lame de fer. » D’autre part, Réal aurait ainsi confirmé ce propos : « J’ai beaucoup insisté ; Georges a résisté à mes exhortations et a fini par me dire : mes camarades m’ont suivi en France, je les suivrai à la mort. » Plusieurs assurent qu’il aurait grommelé : « Ce bougre-là voudrait m’avilir avant de m’assassiner ! » Et l’on cite encore de lui cette noble parole : « Me promettez-vous une plus belle occasion de mourir ? »

Au vrai, rien de subsiste d’authentique sur les efforts tentés au moment suprême pour émousser le courage du dernier chouan ; les versions si diverses des contemporains prouvent seulement le prestige qu’exerçait sa grande figure et l’admiration inspirée par son impliable fermeté. Desmarest lui-même exalte cet homme extraordinaire qui, « animé d’une haine invétérée contre Bonaparte, s’arrêta quand il tint dans ses mains la vie de son ennemi » ; car, s’il avait consenti à quitter la cause des Bourbons pour se rallier à Moreau, Napoléon eût été perdu.