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monde est pour moi. Je serai nommé premier Consul avec Pichegru et on vous réhabilitera. » Georges s’écria qu’il ne prétendait pas seulement à cela, qu’il voulait être nommé troisième Consul. À ces mots, Moreau lui déclara que si l’on savait seulement que lui, Moreau, était d’intelligence avec un chouan, toute l’armée se lèverait contre lui et le coup manquerait. Il fallait d’abord tuer le Premier Consul et alors tout le monde se déclarerait pour Moreau… Des reproches furent alors échangés : « Vous nous faites venir et vous ne pouvez rien ! » Georges ajouta même : « Bleu pour bleu, j’aime encore mieux Bonaparte que vous ! » Là-dessus ils se séparèrent. »

Ce raccourci d’un épisode très important, expose exactement la position prise par chacun des conspirateurs : si vraiment, ce qui étonne, Georges émit la prétention de partager le pouvoir avec les deux généraux, c’est parce qu’il les sentait prêts à l’évincer, le coup fait, lui et ses Princes. Pichegru, très chaud partisan, à Londres, du Comte d’Artois, se refroidissait maintenant, depuis qu’il avait retrouvé son frère d’armes : il s’éloignait manifestement de Georges, et celui-ci, royaliste intégral, s’apercevait qu’il avait été le jouet d’une illusion et que les hommes imprudemment associés à son projet ne partageaient point sa dévotion à la monarchie légitime. Avec leur concours, il était possible, facile peut-être, de renverser Bonaparte, mais pour livrer la