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formant l’avant-garde du Prince, et pourtant les apprêts du « Coup essentiel » restaient en souffrance. Pichegru et Moreau, sans lesquels on ne pouvait rien entreprendre, ne s’entendaient pas : au premier contact, le vainqueur de Hohenlinden et le conquérant de la Hollande, se trouvant tous deux en disgrâce et animés d’une égale et farouche rancune, s’étaient montré bon visage ; mais, si l’indolent Pichegru, devenu timide, se contentait d’un rôle de comparse, Moreau, travaillé par son ambitieuse belle-mère, jugeait excellente l’idée d’abattre Bonaparte, mais à la condition qu’il lui succéderait et il se refusait à travailler pour les Bourbons. Aussi n’admettait-il point l’ingérence de Georges en une affaire « qui n’intéressait que les généraux ». L’entrevue fameuse de Pichegru, de Moreau et de Georges, le 28 janvier, sur le boulevard de la Madeleine, a été relatée et commentée bien des fois. Voici comment, quinze ans plus tard, Napoléon la racontait à ses compagnons de captivité durant les longues soirées de Sainte-Hélène. « Moreau venait par la rue Royale et Pichegru fut au-devant de lui par le boulevard ; il l’embrassa et lui annonça qu’il venait dans la capitale pour renverser le premier Consul. Georges restait à l’écart. Pichegru fut le chercher et le présenta à Moreau… celui-ci en était fort embarrassé. Georges lui demanda sur quoi il pouvait compter : « Renversons Bonaparte et alors tout le