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gibernes, un sabre à la hussarde, un chapeau à trois cornes… ». Un peu plus loin, dans une cabane « construite en planches et en terre », au centre d’une lande bien boisée, étaient deux vieux pantalons, un gilet d’étoffe verte, trois paires d’éperons, « deux volumes de Théorie pour les évolutions de l’infanterie française », du papier, des plumes, une bouteille d’encre… Sûrement c’était là l’une des tanières où séjournait le proscrit ; mais il restait invisible.

Il ne quittait pas le pays cependant ; il y errait, désolé, lamentable et silencieux. La perte de Mercier-la-Vendée l’accablait. N’apercevant qu’un apaisement possible à son désespoir, il voulait voir Lucrèce, la sœur de son ami, avec laquelle il s’était fiancé sept ans auparavant et dont la présence pourrait seule apporter un soulagement à sa douleur ; c’est alors qu’il adressa aux parents de la jeune fille cette lettre qu’il faut citer presque intégralement, car il s’y découvre sous un aspect nouveau : toujours autoritaire, certes, mais tendre, torturé moralement, éperdu et criant à l’aide…


Je vous écris l’âme oppressée… Jonathas (c’était l’un des surnoms de Mercier), le seul ami que j’avais sur la terre, n’est plus. Il est mort en servant sa religion, son roi et son pays, plein de gloire et de vertu ; c’est toute la consolation qui me reste… Hélas ! Maintenant il est au ciel et nous restons sur cette terre, malheureux, chargés de sauver tous nos amis.