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Lorient. À une demi-lieue d’Auray, au lieu dit Corohan, une fusillade éclate. Qu’est-ce ? Les chouans ? — Non, aucun brigand n’est en vue : c’est une fausse alerte… Mais Julien est tombé, frappé de quatre balles. Il est mort. Huit soldats gardèrent son cadavre pendant quelques heures, puis l’abandonnèrent sur le bord du chemin où les jeunes filles d’Auray vinrent le recueillir afin de le transporter au hameau de Léaulet, qui est à gauche de la route de Lorient. Le corps attira là, durant deux jours, une foule de pèlerins avides de le contempler ; la mort n’avait pas défiguré le pauvre Julien « et la beauté de ses traits apparaissait encore sur son visage ». Le souvenir de son assassinat est resté bien longtemps vivace dans la région et peut-être n’y est-il pas tout à fait aboli. Pendant plus d’un demi-siècle, on répéta aux veillées le lied que le captif composa la veille de sa mort et que le geôlier l’entendit chanter « aux derniers rayons du soleil couchant » :


Que sont devenues les rues d’Auray
Où je me promenais autrefois ?
J’avais honneur et plaisir
Et maintenant je n’en ai plus.


Le père Lemoing, le « vieux parrain » qui avait vendu son filleul pour trente sous, croyait bien que nul ne soupçonnait son infamie ; en quoi il se