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révoltée contre l’autorité paternelle, avait saisi avec autant d’empressement que de rouerie l’occasion de fuir le toit de ses parents ; ayant enjôlé, par la comédie de ses larmes, un riche gentilhomme aussi naïf que débauché, elle s’était implantée dans l’intimité de ce galant seigneur par un simulacre de repentir, de réserves pudiques, de dévouement et d’attachement qui lui avait mérité d’être prise au sérieux et gardée comme servante-maîtresse. En refusant les sommes que lui offrait son ravisseur, elle flattait sa gloriole d’être aimé pour soi-même, ce qui est, comme nul ne l’ignore, la marotte des Gérontes de tous les temps ; en repoussant la proposition de mariage, la fausse Agnès consolidait à tout jamais sa situation, par cette preuve éclatante de désintéressement ; elle rêvait mieux, d’ailleurs ; elle s’appliquait à conquérir ce fils aîné dont l’éducation lui était confiée, mettant toute son astuce à faire de lui un être veule, insouciant, sans défense, moralement débile, qu’elle manœuvrerait à volonté et