Page:Lenotre - Babet l’empoisonneuse, ou l’empoisonnée, 1927.djvu/40

Cette page n’a pas encore été corrigée

prélever d’importantes commissions ; mais comme ces expédients réédifiaient la fortune de son bien-aimé pupille, heureuse du résultat, elle fermait les yeux sur le reste. Quant à Charles de Normont il vivait dans l’extase, s’enfermant de longues heures avec Leverd pour l’entendre célébrer les grâces, les mérites et l’innocence d’Élisabeth, panégyrique auquel l’épicier se prêtait volontiers dans la crainte que l’éloignement refroidît l’amoureux. Ainsi entretenue soigneusement, la déraisonnable passion du gentilhomme se manifestait incandescente en des lettres dont quelques-unes ont été conservées ; leur style surpasse en hyperboles celui des actes d’adoration : — « Mon cœur, mon âme, ma vie, tout ce que je possède, ma bien-aimée, est à vous sans réserve. Je ne suis plus moi, je suis vous ; je ne pense qu’à vous ; je ne respire que par vous et pour vous ; je n’aime la vie que par vous ; je ne suis heureux que par vous ; je n’adore que vous et, comme la divinité, vous êtes partout ! Puissions-nous un jour ne faire qu’un