Page:Lenoir-Rolland - Poèmes épars, 1916.djvu/69

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Le noir cheval hennit : Ouvre-nous, Marguerite,
Viens prendre notre enfant qui dans mes bras s’endort !
— Est-ce donc vous enfin ! Oh ! donne-le-moi vite,
Que je l’embrasse ! Dieu !… — Quelle crainte subite
A fait pâlir ton front ? — Père, ton fils est mort !

M. Alexandre Dumas père a prêté aux Sylphes un autre caractère :

Je suis un sylphe, une ombre, un rien, un rêve,
Hôte de l’air, esprit mystérieux,
Léger parfum que le zéphyr enlève,
Anneau vivant qui joint l’homme et les dieux.

De mon corps pur les rayons diaphanes
Flottent mêlés à la vapeur du soir.
Mais je me cache aux regards des profanes,
Et l’âme seule, en songe, peut me voir.

Basant du lac la nappe étincelante,
D’un vol léger j’effleure les roseaux,
Et, balancé sur mon aile brillante,
J’aime à me voir dans le cristal des eaux.

Dans vos jardins quelquefois je voltige
Et, m’enivrant de suaves odeurs,
Sans que mon poids fasse incliner leur tige,
Je me suspends au calice des fleurs.

Dans vos foyers j’entre avec confiance,
Et récréant son œil clos à demi,
J’aime à verser des songes d’innocence
Sur le front pur d’un enfant endormi.

Lorsque sur vous la nuit jette son voile,
Je glisse aux cieux comme un long filet d’or,
Et les mortels disent : “ C’est une étoile
Qui d’un ami nous présage la mort. ”