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GRAZIELLA

 Le flot mêlait ce chant lointain !
Parfois, montés tous deux sur la vieille nacelle,
 Que nous détachions des roseaux !
Nous regardions passer cette lampe éternelle,
 Que nous détachions des roseaux,
Phare mystérieux suspendu sur les eaux !
 Combien son humide paupière
 Aimait cette pâle lumière,
 Rayons mêlés d’ombre et de jour !
 Combien, en la voyant sourire,
 Mon âme éprouvait de délire,
 Mon cœur accumulait d’amour !
Quinze ans, hélas ! jetaient sur son charmant visage
 Cette virginale pâleur
Que la main du désir laisse sur son passage,
Ou que la volupté met sur un front rêveur !

III

 La vague venait en silence
Sécher sur les bords du golfe immense !
 Elle attendait sous l’oranger !…
 Qu’avait-elle donc à lui dire ?…
 C’est que sur un léger navire
 Demain embarque l’étranger !
Leur adieu fut nâvrant, puisque l’Italienne
 Lui donna ses lèvres de miel,
Qu’elle pleura longtemps, qu’une main dans la sienne,
De l’autre lui montra l’azur de son beau ciel !