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LES ANTÉCÉDENTS

je l’attendais, mais la satisfaction qu’elle me cause est bien contrebalancée pour ce que me mande ma sœur. Maman, selon toute apparence, ne va que de mal en pis. Il est triste pour moi de ne pouvoir me dissimuler que je suis pour quelque chose dans sa maladie par le chagrin que je lui ai causé, mais il n’est pas possible de revenir sur le passé. Le seul remède en mon pouvoir est l’avenir. Puisse-t-elle avoir le temps d’en faire l’épreuve. Je ne sais pas quel est son état ; mais j’ai tout lieu de croire que l’on m’en dit encore moins qu’il n’y en a ; au reste, j’espère le connaître bientôt par moi-même. Triste espoir qui me fait craindre ma liberté, et avec d’autant plus de raison, que ma sœur me l’annonce d’une manière bien indifférente. Je ne sais si je dois attribuer à son trouble la liberté qu’elle prend de vous prier de m’emmener avec vous. Quant à moi, je suis si confus des peines que je vous ai données que je n’ose plus rien vous demander. Hors d’état de vous procurer ma reconnaissance autrement que par des paroles que j’estime fort vaines, je ne saurais que vous répéter encore, maladroitement peut-être, mais avec vérité, avec quels sentiments

J’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

De Saint-Just.

Outre ces lettres nous avons un document sur le futur procureur : le poème qu’il vient d’écrire. Organt semble bien devoir être rapporté à cette date, comme le faisaient déjà certaines traditions. En retarder la composition serait d’ailleurs méconnaître Saint-Just : quelques années plus tard, ce n’est pas Voltaire qu’il imite, c’est Montes-