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SAINT-JUST

l’affaire du roi. Cette fois il consent à juger l’homme et à mépriser décidément Louis XVI. Pendant le procès du roi, Saint-Just fut au bureau l’un des six secrétaires que la Convention nommait pour un mois. Les papiers, les pièces, tout lui passe par les mains, ces pièces que Valazé, assis devant la barre, les jambes croisées, tendait au roi par-dessus l’épaule. Or, une chose l’a frappé, son insistance est telle quand il parle des papiers du roi, ces témoins de l’incapacité réformatrice chez Louis XVI, qu’on y sent le mépris de l’intellectuel inquiet de réformes, studieux de révolution et de gouvernement nouveau, le dédain presque physique du jeune homme maigre qui monte à la dictature pour ce prince obèse qui en descend : « On n’a point trouvé parmi les papiers du roi des maximes sages pour gouverner ; les droits de l’homme même, et rien qui permette au plus hardi sophiste de dire qu’il ait jamais aimé la liberté. » Il y revient encore : « Mais qu’on juge par la morale du roi, par ses vues consignées dans ses papiers… » Saint-Just, qui savait dès lors ce qu’on eût trouvé dans les siens, fait sans doute une comparaison. Ce rien des papiers du roi, ce néant des méditations souveraines l’a sincèrement ému. Il a besoin d’un effort pour abandonner