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LES ANTÉCÉDENTS

mais souveraine débonnaire, c’est ainsi que je l’entends. Vous êtes fait pour lui tenir lieu de tout au monde, mais l’amour ne console point l’amour-propre, et l’amour-propre d’une femme, vous le connaissez. Elle vous rendra heureux, je l’espère et j’en suis convaincu. Je n’épouserais point ses torts à votre égard : vous m’êtes également chers l’un et l’autre, et dans toutes les circonstances, je vous montrerai le cœur d’un frère et d’un bon ami.

Adieu. Embrassez votre chère épouse, embrassez-la même de temps en temps, pour moi, afin qu’elle se souvienne que je l’aime et qu’elle vous le rende.

Je suis votre frère et votre serviteur.

De Saint-Just.

À Blérancourt ce 9 décembre 1791.

P.-S. Je vous prie de présenter mon respect à Madame Hannotier et à M. le curé, et à votre famille que j’aime comme la mienne.

On vous embrasse ici et l’on se porte bien.

Mais derrière cette sollicitude affectueuse d’un chef de famille un peu despote, il y a ce que Saint-Just ne dit pas à M. Adrien Bayard, le juge de paix. Il y a « cette fièvre républicaine qui le dévore et le consume », l’anxiété de n’être pas à Paris quand Desmoulins, quand les autres y sont. Cette volonté magnifique dont on lui saura gré aux frontières, l’habile intelligence des grands rapports et des discours spéciaux, l’activité en puissance d’un membre supérieur du Comité de