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la triomphatrice

Claude.

Petite loque ! Peut-on se laisser aller… Je vais te le préparer ton Flahaut. Ah ! Denise, embrasse-moi, nous rirons bien ce soir. (La jeune fille se laisse aller inerte et sans abandon.) Ma sotte petite chérie, oh ! l’héroïne bêbête, quel roman idiot on ferait avec cette demoiselle-là…

(Flahaut entre pendant que Claude berce encore sa fille, qu’elle garde dans ses bras pendant les premières répliques.)


Scène 2

Claude, Flahaut, Denise.
Flahaut, ému, sourdement, avec une dévotion d’adorateur.

Je suis content de vous, mon cher maître, quel livre ! J’ai passé ma nuit à vous lire et vous relire… quel style ! ah ! le métier ne vous tue pas, vous ! Vous êtes la verve, la force, la vie. Je plains ceux qui devront avoir du génie après vous… Il y a des mots pour lesquels on ne sait pas si l’on doit vous haïr ou vous adorer, tant l’on est certain qu’on ne les retrouvera jamais.

Claude, jouant la distraction, la bouche dans les cheveux de sa fille, qui a fermé les yeux.

Oui, oui… c’est très bien ce qu’il dit là… Ce n’est pas le premier venu, personne ne sait flatter comme ce garçon-là… Et puis, il aime vraiment les belles choses… ce qui ne l’empêche pas quelquefois d’être bouché, bouché, borné… (La jeune fille s’est dégagée, s’éloigne et sort pendant les répliques suivantes.)

Flahaut, nullement inquiet.

Si borné que cela, madame ?

Claude.

Va-t-en, Denise. (S’asseyant et regardant le jeune homme avec souci.) Pourquoi faites-vous de la peine à ma fille ?