Page:Lenéru - La Triomphatrice.djvu/113

Cette page a été validée par deux contributeurs.
113
la triomphatrice

chez nous… Si jamais une scène finale doit avoir lieu entre nous… je ne l’accepte que là où je serai moi toute entière… Quand je sentirai encore le poids de ta nuque dans mes mains, ou quand tu me prendras par les épaules de ton beau geste menaçant, quand je ne sais pas si tu vas me battre ou m’aimer…

Sorrèze, bouleversé.

Vous cherchez l’holocauste a notre orgueil, la réparation ? Car notre amour ne peut plus être que cela : une réparation… Je ne veux pas que votre corps tenu jadis dans la joie nouvelle de l’égalité, me soit une amorce… (Un silence, ils sont prêts à sangloter. Simplement.) Allons, vous voyez bien que c’est fini, adieu.

(Il lui tend la main.)

Claude, le regardant, timidement.

Michel, vous ne souffrirez plus… quand vous m’aurez quittée ?

Sorrèze, net.

Je souffrirai d’une autre façon que je préfère… (Elle ne peut dire un mot.) Je m’en vais à temps, je refuse d’assister à ma déchéance, voilà tout… taisez-vous… rappelez-vous ce que nous étions… et puis là, tout à l’heure, avec Flahaut, cette épée flamboyante entre vous et moi… non, non, non… la déception deviendrait impatience et puis tolérance… jamais, jamais…

Claude, affolée.

Vous êtes un inventeur de tortures… tout cela n’existe pas.

Sorrèze, avec autorité.

Si, tout cela existe… L’amour de l’homme seul peut descendre, celui de la femme doit monter. (Sombre et brusque.) Je vous ai tout dit. Laissez-moi partir quand mon départ vous blesse encore, quand vous pouvez souffrir encore par moi.