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et le détail. Chacun sait à quoi s’en tenir. Cela suffit à la rigueur ; mais dans une petite ville, dans l’épanouissement des libertés municipales, c’est tout autre chose.

Cependant, par une très rare exception aux règles générales, dans le bourg de Rhuys, moitié breton, moitié normand, et composé de deux longues rangées de maisons curieuses, aux deux bords de la route, baptisée du nom de Grande rue, les trois personnages principaux de l’endroit avaient résolu ce difficile problème de vivre en assez bonne harmonie, comme des êtres intelligents et d’honnête compagnie : l’abbé Dufresne, curé de la paroisse, le médecin des âmes ; le docteur Le Bihan, chargé des cures corporelles, et maître Gerbier, déjà nommé, minutant les divers contrats de sa nombreuse clientèle. Ils se voyaient journellement en très bons termes, et ces deux derniers avaient leur banc à l’église. La foi du docteur était peut-être à dose homéopathique, et on eut trouvé, sans doute, un grain de scepticisme au fond des croyances de maître Gerbier ; mais il n’y paraissait guère. Ils écoutaient religieusement la messe du dimanche, et même parfois les vêpres des grands jours.

Ajoutons que ces trois honorables personnages n’étaient pas absolument dédaigneux des biens de la terre : la table de M. l’abbé se