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veuve ruinée, d’une santé très compromise, avec une charmante petite fille aux yeux superbes, mais qui toussait à en faire frémir, et qui n’avait plus qu’un souffle… M. Grandperrin, depuis longtemps reçu et estimé dans la famille, et déjà riche à millions, est venu à point dans une heure de crise, a demandé très humblement sa main à Mme d’Évran, qui, ne songeant qu’à sa chère petite presque mourante, et dont l’avenir était noir, a consenti par amour maternel… Et voilà comme Mlle Alise d’Évran est devenue la belle-fille de M. Grandperrin…

— Circonstances atténuantes, répondit Albert avec un soupir d’allégement. C’est égal, pour la marquise d’Évran, s’appeler Mme Grandperrin, c’est dur…

— Peut-être, reprit Germaine. Mais depuis, la petite fille a grandi dans l’or et dans la soie, comme une belle enfant dorlotée, gâtée, adorée. Autrement, elle n’eût pas vécu et ne fût pas devenue la grande demoiselle que vous auriez pu voir si vous étiez entré cinq minutes plus tôt.

— Charmante, un modèle de perfections, n’est-ce pas ? dit Albert avec une nuance d’ironie.

— Sans doute, fort belle à tous égards, ni trop sérieuse, ni trop enjouée, pensant juste, parlant bien, et marchant avec une grave élégance…