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un éclair dans ces grands yeux si obstinément voilés ; si ce cœur en deuil de son premier amour resterait à jamais fermé ; et, en attendant la solution du problème, on avait baptisé la jeune femme d’un surnom. On disait la Carmélite en parlant d’elle.

Thérèse et Mme Desmarennes avaient fait une excursion à la Pointe-de-Grave ; elles étaient descendues à Soulac, dans la vieille église souterraine si profondément enfouie dans les sables. Une autre fois, par un jour de calme exceptionnel, elles avaient pu aborder à Cordouan, au phare planté sur un écueil à quatre lieues des côtes, et qui, de loin, par les temps clairs, se dresse en champ d’azur comme une haute aiguille blanche.

Thérèse monta jusqu’au sommet de la tour, d’où le magnifique panorama de la Saintonge et du Médoc se déroulait à ses yeux dans les splendides lueurs d’un soleil tombant.

Si l’aspect de la mer élargit les pensées et rend plus solennelles les saintes joies des heureux, en revanche, pour ceux qui souffrent, elle fait plus grande la solitude des cœurs. Vue de si haut et de si loin, cette plaine bleue qui s’en allait à l’infini lui semblait immense et éternelle comme son premier amour.

— Quel admirable décor, pensait-elle, pour notre pauvre bonheur perdu ! S’il était encore