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de là. Il était étudiant en médecine, mais il était revenu pour les vacances. Et ils avaient bien ri, à un moment, quand la foule, qui était grande au bal, les avait collés l’un contre l’autre sans pouvoir bouger.

Puis on entra dans la chambre du rez-de-chaussée, qui était la chambre où les Champigny recevaient leur monde. Il y avait une belle toile cirée sur la table, et sur la toile une énorme tarte au riz, avec une belle croûte couleur safran. La fermière plongea son couteau dans la tarte, en fit des quartiers, et chacun tira le morceau qui lui convenait le mieux. Une grosse fille de ferme entra alors, en disant : « Bonjour, tout le monde, » la face largement fendue d’un rire, et mit sur la table une cafetière du bec de laquelle s’échappait une fumée brune, exhalant une odeur de chicorée.

— Encore une tasse ! Encore un morceau de tarte ! répétait à tout bout de champ la fermière.

— Non, merci. Ça ne se peut pas. Je suis toute enflée déjà, disait la femme du fermier Malouin.

— Si fait ! Tout de même.

— Alors une petite tasse, pour vous faire honneur. C’est ça. Merci.

Et elle continuait auprès de Célina et de Germaine.

— C’est-y qu’elle est mauvaise, la tarte, que vous n’en mangiez point ? Hé ! fermier, astique donc les demoiselles ! Ah ! si c’étions pas de vieilles gens comme nous, mais d’beaux gâs !

— Pour ça, oui, disait Célina en riant.

— Allez ! allez ! c’est l’âge ! Et Zoé qu’en dira autant bientôt ! Elle sera comme toutes les filles ! Voyons ! Une petite tasse ! une seule !

Les assiettes se tendaient alors et des nouveaux quartiers de tarte épaississaient l’estomac. Puis on parla des veaux, des porcs, de la récolte. L’odeur des fumiers