béait ; et il continuait à tenir tête, cherchant à gagner le mur pour s’y acculer. Quelqu’un lui passa la jambe, brusquement. Il oscilla, tenta un instant de se rattraper à une table, mais des mains le poussaient, il tomba.
La rixe tourna alors au massacre. Les amis des Hayot, exaspérés, se roulèrent sur Donat, le criblaient de coups de poing, fracassaient ses reins du plat de leurs talons. Un piétinement sourd remplissait la chambre, à travers des bousculades de tables ; par moments, quelqu’un beuglait, un cri de rage s’élevait, pareil à un cri d’animal ; d’entre les dents serrées sortaient des injures furieuses, mais cela se perdait dans l’incessante rumeur confuse de la lutte. L’hôte consterné courait après les verres, en sauvait un çà et là, à la hâte, bien que la plupart gisaient à terre, émiettés, faisant sur les carreaux rouges un poudroiement blanc. Il se lamentait, cet homme paisible, trop âgé pour participer à la querelle, et de temps en temps clamait, criant à merci pour lui et les autres.
Le garde champêtre avait été mandé, mais il tardait ; peut-être ne l’avait-on pas trouvé au logis ; et, en effet, l’envoyé ne tarda pas à rentrer, disant que le garde, profitant de son dimanche, était allé inspecter une coupe de bois, à une lieue du village.
— À moi, Warnant ! gémit Mathieu.
La meute le démolissait ; il ne voyait plus très clair ; ses bras à grand’peine paraient les coups ; il était à bout de souffle. Son appel sonna aux oreilles de Warnant comme un bruit de clairon. À frapper ce grand vaurien de Hubert, il avait oublié son frère. Brusquement il se tourna vers l’endroit d’où était parti le cri, vit Mathieu piétiné par cette bande féroce, se mit debout :
— Hardi ! Tiens bon ! gronda-t-il.
Une chaise se trouvait là. Il la leva, et à deux mains,