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disant des choses qui n’avaient aucun rapport avec ce qu’il pensait réellement. Et comme ils ne descendaient pas, il se décida.

— Ben ! descendez donc ! J’vas dire à la mère que vous êtes là.

— C’est pas la peine, fit Germaine, vexée. Du moment qu’il y a du dérangement…

Une impatience gonflait sa lèvre. Elle se tourna vers son frère, comme pour lui commander de repartir. Mathieu, bon enfant, hésitait. Alors Hayot, pris d’un remords, s’attacha aux brides du cheval.

— Du tout ! Hé, non ! Faut que vous restiez ! Nom de Zo !

Et vivement il défit les traits. Mathieu parut consulter sa sœur d’un regard. Elle haussa imperceptiblement les épaules et se leva de son siége.

— Hé ! Mathieu ! Donat ! Hé ! cria Hayot, arrivez donc aider la demoiselle aux Hulotte qu’est là !

Mais elle avait sauté à terre, déjà. Personne ne répondant, le fermier feignit une colère.

— Ah ! les garçons ! mam’zelle Germaine ! C’est toujours par quatre chemins !

Mathieu remisait la voiture sous le hangar. Le petit ardennais se sentant libre, s’était dirigé vers un tas de luzernes et broyait les verdures avec gourmandise. Dans l’écurie, les têtes des chevaux s’allongeaient, immobiles, à regarder cet intrus.

Hayot alla prendre la bête par la bride, fit reculer les croupes, et lui ayant passé un licol, versa dans l’auge un plein tamis d’avoine.

— D’abord les bêtes, et puis les gens, fit-il en revenant vers Germaine.

Et cette fois, il la poussa résolûment dans la maison. Il offrait de la bière, du vin, du café, tout ce qu’elle voulait.