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Et son regard l’embrassa des pieds à la tête. Il reprit, avec un peu de colère :

— Oui, moi, j’vaux-t-y pas un autre ?

Elle éclata. C’était lui la faute qu’une pareille chose lui arrivait. Il n’avait qu’à ne pas la retenir. À présent, elle était moins que rien ; elle découchait, elle était obligée de passer la nuit dans le bois. Les garces au moins ont leurs lits. Et amenée par le mot à d’autres idées, elle lui reprocha de l’avoir traitée comme toutes les salopes auxquelles il était habitué. Il avait eu des fréquentations malpropres. Ça se voyait bien. Sans ça, il l’aurait respectée, etc.

Il répondit une parole courte, terrible :

— T’avais qu’à pas t’laisser faire !

Cette férocité froide l’abattit. Il l’insultait à présent, plus tard il la frapperait sans doute ? Elle eut des larmes.

Il céda à un bon mouvement alors et s’assit auprès d’elle.

— Voyons, Germaine, tu diras à t’papa,…

Elle l’interrompit net :

— On ne s’vena plus. C’est fini.

Hein ? Qu’est-ce qu’elle disait ? Il demeura un instant immobile. Cette parole résolue l’avait étourdi comme une tapée de crosse. Enfin, il se leva, marcha à elle.

— Que je n’te voie plus, Germaine ?

Il tendait le cou, les yeux convulsés, comprimant sa poitrine de ses deux mains crispées. Il continua :

— Que je n’te voie plus ! Et c’est toi, Germaine, qu’as dit ça ! Tiens ! si c’était vrai, ben là ! je t’prendrais par le cou, comme ça, et j’te…

Il n’acheva pas. Elle avait poussé un cri.

Alors il tomba sur elle, les bras ouverts, hoquetant, secoué d’une énorme défaillance.

— J’suis bête, pour sûr. J’ai mal compris. Tiens, Ger-