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fois, d’un grand mouvement de bras, lui disait de venir.

— Tiens ! tiens ! se dit-il. C’est la Cougnole qui m’appelle ! Elle m’veut du bien, p’t-être.

Et se rappelant les différents métiers de la vieille, il eut vaguement la pensée qu’elle pourrait servir à leurs amours. Il répondit à l’appel en secouant son chapeau dans l’air. Et à petits pas, tranquillement, il arriva à la maison.

— C’est toi qu’es avec Germaine ? dit-elle. Pourquoi n’entres-tu pas ? C’est sa maison, donc, à elle et à tous ceux pour qui elle a de l’amitié.

Elle leur faisait des clins d’yeux, à tous deux, avec une longue échine sèche et plate, sous des vêtements rapiécés, très propres. Un châle de laine couvrait sa tête aux yeux vifs, qui louchaient. Elle avait la peau dure et jaune des femmes vivant dans les bois, et ses grands gestes brusques avaient l’air, à chaque mouvement, de la casser en deux.

Le visage du gars parut lui rappeler quelqu’un. Elle le regardait curieusement :

— J’tai vu. Sûr comme t’es là… Mais pour dire quant à où.

Elle cherchait dans sa mémoire.

Brusquement elle frappa ses cuisses du plat de la main et s’écria qu’elle le reconnaîtrait entre mille, qu’il était Cachaprès, qu’on le lui avait montré un jour dans un village, et elle citait l’enseigne d’un cabaret où elle se trouvait à boire avec des femmes quand il avait passé. Il se souvenait du cabaret. Oui, il avait de ces côtés un bon camarade. Et il souriait. La vieille finit par dire qu’elle n’avait jamais connu un garçon ni plus beau ni plus brave que lui, ajoutant :

— T’as là un fier homme, Germaine.

Le panier avait été posé sur la table. Germaine en tira