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— C’est le chat de Slipper, je le savais bien, cria Dolf, quand Nelle l’eut décoiffée.

Chacun tendit alors son assiette, et Nelle, plongeant la louche dans la casserole, en tirait de la viande brune, coupée par morceaux, qu’elle versait sur les assiettes, avec beaucoup de sauce. Dolf regarda attentivement les morceaux que lui donnait Nelle, les flaira l’un après l’autre et au bout d’un instant, frappant des poings sur la table, s’écria :

— Dieu me pardonne, Riekje, ce sont des schœsels.

Et, en effet, c’étaient des tripes de bœuf accommodées à la manière flamande, avec le foie, le cœur et les poumons. Dolf d’abord piqua les plus gros quartiers à la pointe de sa fourchette, et pendant qu’il les avalait, il passait sa main sur son estomac pour montrer que c’était bon.

Et Tobias disait :

— Nelle est une fameuse cuisinière. Je sais bien que chez le roi Léopold on mange les schœsels au vin, mais Nelle les fait tout aussi bien à l’eau.

— Certes, c’est là une bonne fête de Saint-Nicolas, dit Dolf à sa femme en faisant claquer sa langue contre son palais. Nous nous souviendrons toujours que nous avons mangé des tripes à la Saint-Nicolas de la présente année.

Voici que la vieille Nelle se lève de table et installe la poêle à frire sur le feu. Mais elle a pris soin, avant tout, de jeter des margotins sur la flamme après avoir raclé les cendres avec le crochet. Alors la fonte recommence à ronfler et Nelle, tout à coup devenue sérieuse, découvre la pâte.

Celle-ci se soulève jusqu’au bord de la casserole, grasse, épaisse, odorante, avec de petites boursouflures qui la gonflent çà et là. Nelle immerge la cuillère à pot