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graissa d’un peu d’oing et la mit tiédir un instant sur le feu, pour que la pâte y roussît partout également. Et, assis l’un près de l’autre sur le même banc, Riekje et Dolf, ayant pris des pommes dans un panier, les coupaient en rouelles, après avoir enlevé les cœurs et les pépins.

Alors Nelle sournoisement alla chercher une seconde casserole dans l’armoire et la posa sur le feu ; puis elle y mit de l’eau tiède, de la farine, du thym et du laurier. Dolf s’est bien aperçu que la casserole contient encore autre chose ; mais Nelle l’a si rapidement recouverte qu’il ne sait si c’est de la viande ou des choux. Et il demeure perplexe, ruminant des conjectures.

Petit à petit le contenu commence à bouillonner et une mince fumée brune s’échappe du couvercle qui danse sur les bords. Dolf maintenant allonge son nez du côté du poêle et il ouvre si fort ses narines qu’on logerait une noix dans chacune ; mais toujours l’odeur le déçoit.

Quand enfin maman Nelle va lever le couvercle pour voir si ce qu’il y a dessous cuit comme il faut, il se dresse sur la pointe des orteils et cherche à se glisser derrière son dos, en se faisant tout petit et puis tout long, pour paraître plus comique. Et Riekje rit derrière ses mains, en le regardant du coin de l’œil. Tout à coup Dolf pousse un grand cri pour surprendre sa mère, mais Nelle l’a vu venir, et au moment où il croit plonger son regard dans la casserole, elle rabat le couvercle et lui fait une belle révérence. Qui est bien attrapé ? C’est Dolf. Et cependant il s’écrie en riant :

— Cette fois-ci, je l’ai vu, mère. C’est le vieux chat de Slipper que vous avez mis à la casserole et vous l’avez engraissé avec des chandelles.