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— Faites donc attention, Cadie ! Vous allez tout déchirer. A-t-on une idée d’arranger ainsi les paillassons !

— Mais, Thérèse, s’exclamait madame Spring en s’arrêtant toute dépitée, j’ai cru bien faire, probablement.

Et elle ajoutait aussitôt après, avec un grand soupir :

— Combien je suis malheureuse ! Tout le monde m’accable.

Elle se débarrassait de son châle et de son chapeau qu’elle étalait sur une chaise, dans la chambre à coucher, puis se laissait tomber dans un fauteuil, près du feu, de tout son poids.

— Saperlipopette ! criait ma tante. Vous avez donc juré de tout casser, Cadie ?

— Moi, Thérèse ? mais pas du tout. Je ne sais vraiment pas ce que vous avez ce soir contre moi.

Un silence. Et de nouveau la voix de ma tante s’entendait :

— Vous êtes venue bien tôt, ma chère, sans vous faire de reproche. Il est tout au plus six heures.

— Six heures, Thérèse ! Est-ce qu’il n’est pas plus de six heures ? J’ai pensé qu’il était au moins six heures et demie. Mais aussi la maison n’est plus tenable !

Généralement à ce moment, ma vieille parente s’éclipsait, puis reparaissait, une vaste éponge dans les mains, et longuement se mettait à laver le parquet là où madame Spring avait passé.

Tout en achevant cette besogne, elle disait :

— Je ne sais vraiment pas, Cadie, comment vous êtes faite. Mais vous dégouttez comme un parapluie.

— Est-ce Dieu possible que je dégoutte ? disait madame Spring tristement.

Et, levant les yeux au ciel, elle reprenait :

— Ah ! si vous saviez, Thérèse !

— Allons, c’est bon. Ne venez pas me chanter vos