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chambre, tendant leurs petits bras et mêlant leurs compliments.

Comment quatre bougies s’étaient trouvées allumées sur la cheminée, c’est ce qu’on ne sait pas plus que la manière dont s’était fait le feu. Sur la table, la belle lampe des dimanches brûlait, jaune et claire, sous son abat-jour de porcelaine ; et dans l’armoire, les verres vaguement tintaient, comme pour rappeler qu’ils ne seraient pas fâchés d’être de la fête.

La porte a crié en s’ouvrant et pourtant la grand’mère n’a pas tourné la tête ; mais les deux petits enfants élèvent si haut la voix qu’elle feint de s’éveiller et passe sa main sur ses yeux. Un léger tremblement agite alors tout son corps ; elle voudrait parler et ne le peut pas ; mais deux larmes heureuses coulent lentement sur ses joues, et à son tour elle leur tend les bras. Il arrive bien que sa robe fait connaissance avec la crème des tartes, mais qui pense à une petite tache sur la robe, en de pareils moments ? On pose sur ses genoux les bouquets et les gâteaux, et chacun, en lui offrant son présent, l’embrasse sur ses bonnes joues tremblantes comme de la gelée.

Quand tout le monde a fini, c’est le tour de la servante ; elle présente ses fleurs, puis frotte sa bouche du revers de sa manche et demande la permission d’embrasser la grand’mère, comme les autres. Tandis qu’elle lui appuie sa grosse figure honnête sur les pommettes, on la voit en même temps sourire et pleurer ; et les deux petits enfants montrent leurs dents blanches et crient :

— Vive sainte Catherine !

Est-ce la flamme du foyer, est-ce le reflet des rideaux ou bien la clarté des bougies qui, tout à coup, a fait passer comme un feu rose sur le visage de la grand’-