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de ses doigts. Le monde est bien dur ! Que va-t-il faire maintenant ? Il voit dans l’ombre une porte profonde dont la neige n’a pas recouvert le seuil ; il y va. Tenez, le voilà qui s’assied, après avoir eu soin de tirer son manteau sous lui ; et son menton sur ses genoux, il s’endort.

Tout à coup il lui semble que la terre s’est dérobée sous ses pieds. Est-ce lui qui monte ? Est-ce la terre qui descend ? Qu’importe ! ce qui se découvre à ses yeux est bien plus beau que la terre. Et tout de suite il sent une odeur délicieuse, comme celle qui sortait de la cave du pâtissier. L’air est embaumé de vanille, de safran, de cannelle, de citron, et un petit vent chaud répand ces bonnes odeurs au loin. Dieu ! qu’elles sont enivrantes ! Il les sent couler dans ses veines comme le jus des fruits mûrs.

De magnifiques campagnes s’étendent à présent devant lui, avec des tons de pourpre, d’émeraude et de turquoise, jusqu’aux horizons de montagnes qui dentellent l’azur du ciel. Et un abricot, étincelant comme un soleil, répand sa lumière sur les gelées, les sirops et les crèmes du paysage. Jamais le vrai soleil ne lui a paru à la fois si brillant et si humide !

« Seigneur ! Seigneur ! que tout cela est bon et qu’il fait doux de vivre ! » Ainsi se parle Francesco, car il vient de prendre un bain dans la crème et il a mangé trois îles coup sur coup.

Puis une montagne en caramel se dresse devant lui, surmontée de la même tour qu’il a vue chez le pâtissier. Qui donc habite la tour ? Ce ne peut être qu’une fée, et la fée sans doute est la reine du pays qu’il vient de parcourir.

Mais comment pénétrer dans la muette et splendide tour ? Il cherche en vain la sonnette. Toc, toc ! fait-il