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Et près de l’alcôve se trouve le pupitre en vieux chêne sur lequel le meunier écrit ses quittances. Ah ! c’est une bonne vieille chambre, mais on n’y entre pas souvent, et il s’en émane une odeur de colle de papier.

Tout à coup Lion, le chien de la cour, aboie et le sabot d’un âne martèle à petits coups menus le pavé, dans un roulement sourd de voiture.

— C’est la tante Gudule ! crie-t-on.

Et du fond de la carriole une petite vieille, affublée de châles et de jupons, écarte la paille où elle est assise et saute à terre, lestement, tandis que Martine lui met, en riant de tout son cœur, sa lanterne sous le nez.

Gudule dételle elle-même l’âne, sans vouloir qu’on l’aide, puis le conduit à l’écurie, où elle lui jette une botte de foin.

Ensuite elle entre, poussant en avant sa petite mine de furet et son long nez mince aux deux côtés duquel brillent en clignotant ses yeux gris.

— Bonne Sainte-Catherine, mon frère, dit-elle en entrant. J’ai mis pour vous dans la charrette un sac de noix.

— À table ! fait le meunier.

Alors on entend les domestiques et le farinier qui frottent leurs pieds au paillasson, près de la porte, et ils chuchotent, se demandant ce qu’il faut dire.

— Entrez, les garçons, crie le meunier.

Ils entrent tous les trois, l’un derrière l’autre, et le farinier est en tête ; il a une veste de laine, de la poche de laquelle pend un mouchoir rouge ; et les deux domestiques arborent une belle blouse bleue dont les plis luisent au feu de la lampe, par-dessus leurs chemises fraîchement blanchies.

— Meunière, dit le farinier, après avoir toussé, nous