Page:Lemonnier - Les Charniers, 1881.djvu/52

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



II


Bouillon est un de ces coins sommeillants de province où les commères s’assemblent sur le pas des portes, causant à petit bruit, de longues heures, et que les bœufs traversent, cornant et bousant, à la file pour aller aux champs. Une paix noie la ville, en temps ordinaire ; deux ombres se croisent rarement sur le pavé ; et tout à coup cette quiétude d’abandon s’était fondue dans une tourmente.

Nous traversâmes le pont de la Semoy.

La rivière coulait grise, piquetée par la pluie d’un tas de paillettes, sur son lit de cailloux polis et au loin se perdait, amincie, entre des